You are currently viewing LA GRANDE SOPHIE
photo © Victor Paimblanc

LA GRANDE SOPHIE

Par NadiaKoulla

LA GRANDE SOPHIE vient au théâtre Sébastopol de Lille le 6 avril et voici le message personnel qu’elle vous délivre : « Cher public lillois, je viens parce que je sais que tu chantes très fort. J’espère que tu chanteras encore plus fort parce que l’album La Vie Moderne est sorti le 13 janvier et je sais que tu connais déjà toutes les paroles. Je compte sur toi pour faire les chœurs. Je t’attends, je t’adore. »

Interviewée par ILLICO! le 24 janvier au Moulin d’or de Lille, LA GRANDE SOPHIE nous présente de sa voix douce et feutrée, son neuvième album, réalisé en circuit court depuis son perchoir, son home studio, son refuge, là où elle vit, là où naissent et nichent ses créations. Une bonne heure de bonne humeur à découvrir une femme musicienne autodidacte dont l’imaginaire est tout autant débordant que les talents : chanteuse, guitariste, auteure, compositrice, réalisatrice, productrice, illustratrice, photographe, rêveuse les pieds sur terre comme en mer. Depuis vingt-cinq ans, LA GRANDE SOPHIE est bel et bien là et continuera à nous faire chanter encore fort longtemps !

La Vie Moderne, ton nouvel album, semble dire en musique ce que Les Temps Modernes dénonçait alors en film ?
Il y a des choses que je pointe et qui ne me plaisent pas forcément, oui je me positionne. Je dis dans la chanson «La Vie Moderne» qu’avec nos engins on a la tête baissée, on ne se regarde plus, on est tous comme des fleurs fanées, je pense que plus tard les colonnes vertébrales vont changer, les têtes vont pousser vers le bas (rires). Dans «Vulgaire», je le dis avec un grand sourire, c’est pas du tout une fille en mini jupe mais des gens obnubilés par leur chiffre d’affaires et qui ne vont plus écouter l’essence, le créatif et ne vivre que par le regard de l’autre. Je ne suis pas quelqu’un qui claironne, je réagis et me défends quand c’est nécessaire sans forcément le dire à la planète. J’ai des parents militants, j’ai fait beaucoup de manifs petite, la marche du Larzac ; ayant vécu ça gamine, je rêvais de paillettes ; pour moi l’imaginaire, c’est la liberté absolue.

Et cette pochette de disque, quelle troublante ressemblance avec… à vous de deviner !
Il y a quelqu’un qui me l’a dit aussi. Très honnêtement je n’y ai pas pensé. Pourtant cette femme compte, c’est la chanteuse favorite de ma mère. Quand j’ai emmené ma mère la voir à la Cigale, là j’en ai chialé, tout m’a parlé, c’était une sacrée femme. Ça me fait plaisir ce que tu dis là. Et cette pochette, c’est une photo que j’ai développée pendant le confinement avec une technique qui utilise les UV du soleil et par rapport à tout ce qu’on a vécu, la lumière c’était important. C’est aussi une façon de prendre le pouvoir sur mon image et sur tout cet album : faire les arrangements, ma pochette c’est marquer mon indépendance.

D’ailleurs, comment vis-tu ton rapport à l’image ?
Ça a toujours compté et encore plus maintenant avec les réseaux, c’est présent tous les jours. C’est dur parfois de devoir tout le temps se voir. Par exemple pendant le confinement j’ai pris une photo par jour, au début ça m’amusait, j’étais super excitée et au bout de quinze jours je me disais là il faut encore faire un selfie, j’en ai ras le bol… L’image c’est pas évident. Je suis plutôt réservée alors parfois je me dis que c’est peut-être ce qui me fera tout arrêter…

Et ton rapport au temps, celui qui passe et ne se rattrape plus ?
Il est important, cet album c’est celui d’une femme de 53 ans et demi qui est là et qui tient la barre dans ce monde intransigeant avec les gens qui prennent de l’âge. Dans l’escalier, on a tendance à les pousser sur les côtés et moi je dis non, tout le monde a sa place. Parfois les pics et la cruauté existent dans des phrases qui se veulent bienveillantes que tu te prends dans la gueule, j’en ai tous les jours. Quand je veux par exemple participer à des émissions sur les réseaux et que j’en parle autour de moi on me dit t’es pas de la génération Z et paf ! Ça veut dire quoi ? Je vais crever dans un coin ? Bah non ! Je ne me sens pas larguée et j’ai envie de faire partie de la vie. On est en pleine révolution féminine, c’est pas encore gagné mais on va y arriver, en étant là, en se positionnant, en écrivant aussi avec beaucoup d’autodérision. Il faut rigoler, on est quand même là pour ça. Ne jamais oublier que je fais ce métier pour le plaisir.

Quant à la scène, elle représente quoi pour toi ?
J’adore chanter avec les gens, la foule. Entendre un public chanter, ça donne une force, c’est magique. C’est le présent absolu. Et puis, il faut sentir une salle, il y a une odeur, des regards, la réverbération des lumières et sur ce concert mon feu de camps, un plaisir simple comme la mer. J’ai envie de plonger le public dans l’univers intime de création de cet album. Je suis très contente de revenir à Lille avec qui j’ai une histoire particulière car j’ai travaillé avec l’harmonie de Lille Fives qui m’a accompagnée lors d’un concert aux Francofolies de La Rochelle. Sur scène le 6 avril, je serai avec Louise au clavier et aux chœurs, avec Mathieu à la batterie et Thibault à la basse guitare.

« J’ai envie d’écrire de nouvelles choses, un one-woman show sur mon parcours en musique mais j’arrive pas encore à trouver l’angle. ».

Un duo, une collab rêvée ?
J’ai pas de rêve absolu car beaucoup de choses me sont arrivées par surprise. C’est ce qui s’est passé avec Françoise Hardy. Thomas son fils me dit un jour que sa mère écoute ma chanson quelqu’un d’autre en boucle. J’ai été touchée alors je lui ai écrit par mail et trois minutes après, elle répond direct, ça n’existe pas dans le show-business de répondre aussi vite (rires). On a continué à correspondre, j’ai écrit, réalisé, arrangé pour elle, elle m’a fait confiance. J’adore sa voix remplie d’air, il n’y a qu’elle qui a cette voix-là, on a l’impression qu’elle ne chante que pour nous, elle n’est pas dans la performance vocale. Je l’admire pour son franc-parler, elle est très attentionnée. La voix de Vanessa Paradis m’intéresse et me touche beaucoup, j’écrirais bien pour elle. J’ai eu un gros coup de cœur pour Mademoiselle K, la chanson chloroforme m’a fait chialer, je l’ai invitée un soir au théâtre de l’Atelier pour chanter ensemble et j’aimerais bien faire un duo avec elle. Ça pourrait matcher aussi avec Stéphane Eicher dont j’ai bien aimé le dernier spectacle. Je chanterais bien aussi avec Miossec, j’aime bien son tempérament et j’ai été marquée par ses albums. Côté écriture, j’ai beaucoup aimé la chanson La quête d’Orelsan, l’angle qu’il a choisi, je la trouve hyper bien construite, j’aurais aimé écrire comme ça, bravo mec.

D’autres projets en vue ?
J’ai envie d’écrire de nouvelles choses, un one-woman show sur mon parcours en musique mais j’arrive pas encore à trouver l’angle. Je dessine beaucoup avec la tablette, j’ai fait tout un story-board pour un clip. Et quand il fait beau, je fais du cyanotype (une technique photographique en monochrome bleu développée sous rayons UV). J’ai fait deux expositions, j’aimerais bien poursuivre et proposer d’autres séries d’expo. Et je veux continuer la musique que ce soit que musical ou avec des textes. Pour le reste je laisse venir les belles surprises, je me dis qu’il y en a qui m’attendent.

Merci LA GRANDE SOPHIE pour cette chaleureuse discussion, un peu comme avec une amie à papoter sans filtre au coin du feu. C’était tellement généreux que j’ai presque de quoi écrire un roman.

Agenda

Missing Event Data