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THE COURETTES

Par Raphaël LOUVIAU

Franchement, on ne les a pas vus venir. Un couple, elle à la guitare, lui à la batterie. Ces relectures codifiées d’un passé fantasmé sont toujours agréables mais vite lassantes. Et d’un seul coup, l’épiphanie, Flavia et Martin ont retrouvé le Saint Graal, bu le sang de Ronnie Spector et offert au monde 33 centimètres de bonheur !

Sans parler de concerts toujours plus explosifs. Ceux qui en ont fait l’expérience en parlent des trémolos dans la voix. ILLICO! a tenté d’en savoir un peu plus avant trois concerts dans la région.

Vous semblez être continuellement sur la route, plus de 100 concerts dans 11 pays pour 2022 et portez maintenant le titre de « Couple le plus Travailleur du Show Business ». Comment une telle chose est-elle possible ? Vous avez des superpouvoirs ?
Flavia Couri : Aucun superpouvoir, ce n’est que travail, détermination et passion ! On aime ce que l’on fait et ça fait du bien d’être à nouveau sur la route après une difficile interruption de deux ans.
Martin Couri : Après la pandémie, on a sauté sur tous les concerts qu’on nous proposait. Nous en ferons probablement 120 en 2022. Ces deux ans sans travail et sans revenu ont été infernales mais ça nous a montré à quel point nous aimons jouer et à quel point ça nous manquait ! Notre superpouvoir, c’est la musique. C’est incroyable ce qu’elle peut faire faire. Après James Brown c’est à notre tour de le clamer : nous sommes le groupe le plus travailleur du showbiz !

Est-ce plus facile de travailler et tourner lorsque l’on est un couple à la ville ? J’aurais tendance à penser le contraire mais vous êtes la preuve vivante que je dois me tromper !
Flavia Couri : Nous avons un lien très fort, presque télépathique et je crois que le public le ressent lorsque nous jouons ensemble. Musicalement ça aide. Et puis être un duo facilite la logistique, nous n’avons pas à passer cinq coups de téléphone pour prévoir une répétition et pour tourner, il suffit de deux billets d’avion et d’une chambre double ! Nous avons fait partie de groupes par le passé et tout le monde sait que c’est comme le mariage. Nous, nous sommes mariés, on se doit donc respect mutuel et attention, surtout dans les moments difficiles et les tournées marathon !
Martin Couri : C’est vraiment naturel pour nous : beaucoup de respect, de patience et d’amour. Et nous sommes d’accord sur pratiquement tout, ce qui laisse peu de place aux discussions. Et puis la passion nous anime… 

Tourner, encore et encore, n’est-ce pas le seul moyen d’être reconnu, de vendre des disques et de vivre de son art ?
Martin Couri : Les ventes et le streaming ne permettent pas de vivre de sa musique. Les revenus issus du streaming, par le biais de Spotify par exemple, sont ridicules. C’est une insulte envers les artistes, sauf si tu es Billie Eilish ou je ne sais qui.
Flavia Couri : Gagner sa vie grâce au rock n’roll, à notre niveau, c’est une alchimie compliquée faite de ventes de disque, de streaming, de concerts et de la vente après les concerts. C’est un dur labeur ! Je crois que pour être reconnu, il faut être pertinent, faire des disques et prendre la route. La plus belle reconnaissance que l’on ait eu jusqu’à maintenant est venue de notre album Back In Mono, des éloges qu’il nous a value dans les magazines les plus influents du monde entier. Nous en sommes très fiers et ça nous aide à trouver des dates, ce qui est indispensable pour gagner sa croute !

Parlons de votre discographie : vous avez débuté comme n’importe quel groupe Garage, en empruntant aux références habituelles, Link Wray, Billy Childish et vous êtes aujourd’hui un rêve devenu réalité : un vrai groupe pop avec des gimmick garage, de vraies chansons et une attitude. Comment avez-vous réussi ce miracle ?
Martin Couri : Nous ne volons rien ! Link Wray et les fantastiques girl groups des sixties font simplement partie de note ADN. Nous aimons la pop et sommes fiers de parvenir à écrire tant de chansons ébouriffantes !
Flavia Couri : J’imagine que tu fais référence à la direction musicale de notre nouvel album Back In Mono. C’est ce que l’on a toujours voulu faire ! Notre rêve a toujours été de réussir le mélange parfait entre le son des girl groups des 60s, les mélodies de la pop et la musique garage. Si tu écoutes nos premiers albums avec attention, et bien qu’ils aient été enregistrés de manière beaucoup plus brute, tu remarqueras que ce concept a toujours été là, dans des chansons comme « The Boy I Love » ou « Time is Ticking ». On a toujours voulu enregistrer de parfaites perles pop ou comme tu le dis, « des chansons pop avec des accroches garage et une attitude ». Je suppose qu’avant, on ne savait pas le faire. Ce n’est donc pas un miracle : nous sommes plus expérimentés, on s’autorise désormais à utiliser le studio comme un instrument et on se concentre plus sur l’écriture. Travailler avec Søren Christensen, le producteur de Back In Mono a été déterminant ainsi que construire notre propre studio, le StarrSound Recording Studio.

Peut-être que ce n’est pas un miracle et que vous aviez un plan de domination du monde dès le départ ? Comme Meg et Jack ?
Martin Couri : Rien n’a été planifié, orchestré comme les White Stripes. Nous sommes tombés amoureux, nous nous sommes mariés, avons eu un enfant, avons commencé à jouer ensemble et sortir des disques sur Damaged Goods Records… Et puis on a continué !
Flavia Couri : Je n’ai aucune idée de ce que Meg et Jack ont planifié et je m’en fiche éperdument  J’ai commencé à écrire des chansons dans l’avion qui me rapprochait de Martin car nous vivions séparés par 10 000 kilomètres, on a joué ces chansons dans un studio un jour et elles sonnaient merveilleusement bien jouées avec une batterie et une guitare. Nous n’avions même pas prévu de jouer à deux ! ! J’aime les surprises que la vie nous réserve et peut-être que le fait que nous nous soyons rencontrés alors que nous étions nés dans deux hémisphères différents peut être considéré comme un miracle ! Lors de notre premier concert, Kim Kix de Powersolo était là et nous a invités à enregistrer notre premier album dans son studio et puis tout s’est enchainé très vite. Et puis dominer le monde n’est pas un mal en soi, plus nous toucherons de gens avec notre musique, mieux se sera ! Mais notre objectif est d’écrire et écrire encore, sortir des albums toujours meilleurs et vivre la vie dont nous rêvions. Si des gens veulent nous suivre, super !

Vous semblez assez jeunes, comment avez-vous découvert et adoré la musique qui vous inspire aujourd’hui ? Grâce à vos parents ? À Internet ? En fouillant ? J’imagine qu’il est plus facile de trouver des simples des Flirtations à Londres ou Los Angeles qu’au Brésil ou au Danemark !
Martin Couri : J’ai grandi avec la collection de disques de mes parents. Les Beatles, les Doors, Peter Belli et tant d’autres. Mon grand frère a aussi joué un rôle important, il m’a fait découvrir Blur, Beck et les Beastie Boys ! A l’époque, les radios danoises passaient des tas de disques intéressants. Ca a bien changé ! Pas étonnant que les gens deviennent de plus en plus ignorants.
Flavia Couri : J’ai toujours écouté de la musique. Dès mon plus jeune âge. Je suis né dans les années 80 au Brésil et la musique était partout. Mais tout a commencé pour moi avec la collection de disques des Beatles de ma mère, ils m’ont vraiment ouvert des portes et pas uniquement musicales. La contre culture, la littérature des poètes Beatnik, le cinéma avec la Nouvelle Vague, la philosophie orientale… Internet n’existait pas alors j’achetais des magazines musicaux et étais toujours avide de nouvelles découvertes. Après les Beatles, j’ai découvert les Stones, les Kinks, le Velvet Underground, les Seeds, Sonics, MC5, Os Mutantes… J’ai découvert tout ça très jeune. Les radios passaient du Rock brésilien grand public et MTV Brazil, qui a débuté au début des 90s, était bien moins commerciale que sa grande sœur américaine, on pouvait voir quelques chouettes émissions alternatives qui passaient des groupes indie, riot grrrl, brit pop, grunge et punk. A la même époque, il y avait de grands festivals au Brésil. Enfant, j’y ai vu Nirvana et L7 ! A 13 ans, j’ai vu les Ramones et ça a été incroyable. Avant, j’étais la seule ado qui les aimait dans mon école et d’un seul coup, une communauté rock n’roll s’est formée. J’ai découvert tous ces groupes avec ma grande sœur et on s’est mis à apprendre à jouer de la guitare puis on a découvert la basse et la batterie. J’ai formé mon premier groupe avec ma sœur, elle à la batterie, moi à la basse ! Mon beau-frère m’a laissé sa collection de disques quand il est parti. Il y avait des trucs comme Cream, Hendrix, Jefferson Airplane… Un sacré cadeau pour une jeune rock n’roll girl from Ipanema !

Comment vous considérez-vous dans la longue histoire de la musique pop ?
Martin Couri : J’adore les vinyles. Dans 100 ans, des gens découvriront nos disques dans une brocante quelque part dans le monde et le cycle recommencera !
Flavia Couri : Je pense que notre musique condense le meilleur de l’histoire du rock n’roll, du garage, du surf, des girl groups, du doo wop, du punk, de Motown et de la soul. Nous mélangeons tout ça et proposons un cocktail original qui, je l’espère, touchera les nouvelles générations !