Souvenez-vous, Moloko, le duo de Sheffield et usine à singles («Sing It Back», «Forever More», «Familiar Feeling»…). La voix, c’est elle. Impeccable, classe sans en faire des caisses, l’effronterie subtile et délicieusement vintage (de la typo aux coupes de cheveux). Depuis la fin de Moloko, l’Irlandaise poursuit une carrière solo vivifiante et persiste à recycler styles, époques et influences dans son mixer magique (le clip du tubesque «Let Me Know»).
Une nostalgie qui pourrait donner le tournis si elle n’était pas si savamment détournée, à grand renfort de looks pas possibles, en flirtant avec une féminité parodique et en poussant parfois le make-up dans ses retranchements absurdes.
En parfaite outsider, ça fait longtemps que RÓISÍN MURPHY a piqué la couronne à Madonna. Mais c’est qu’il faut aussi et surtout lorgner du côté de Donna Summer/Giorgio Moroder, Eartha Kitt, ABBA, Annie Lennox ou encore Bowie, pour le côté caméléon voire théâtral. Ajoutez à cela Les Parapluies de Cherbourg qui auraient viré italo-disco. Bref, tout son talent réside certainement en cette synthèse équilibrée. Impressionnante en live, ses performances électriques et décalées (so british) la rendent plus qu’attachante, le concept en sus mais la revendication effleurée du bout des griffes.
Avec ce cinquième album, RÓISÍN MURPHY pousse le curseur et se réinvente en diva bionique option reine de l’aérobic. Une image volontiers sexy contrebalancée par un sens de l’autodérision toujours aussi salutaire et annoncé d’emblée : Róisín Machine (prononcez « Roïcheen » pour saisir le jeu de mots), tout un programme… faussement délicat pour essorage immédiat. Exit l’énième corvée en plein jour, et place au rinçage nocturne de corps et d’esprit (ménagère vs femme fatale ?)…
Avec la complicité du fidèle Richard Barratt (alias Crooked Man / DJ Parrot), la tracklist est une succession de hits. Du funk le plus groovy («Something More», «Murphy’s Law», «Incapable», «Shellfish Mademoiselle») au disco bien senti («Narcissus») jusqu’à sa version hi-NRG («Jealousy»), impossible de ne pas y entendre comme une longue déclaration d’amour réitérée à cette Northern Soul si chérie et au dance-floor jamais tari. Et les couleurs d’origine de s’en trouver étrangement ravivées. Machine à remonter le temps donc ?
Vous l’aurez compris, Róisín Machine est l’album idéal pour se laver la tête des affres du moment et pousser les meubles du salon. Les prochaines battées attendront.