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SPACE ALLIGATORS

Par SCOLTI

Rencontre avec les SPACE ALLIGATORS, un quatuor de pop « mordante » originaire de la Côte d’Opale. Ils étaient au Main Square cet été et vous pourrez les retrouver au festival Les Chavirées à Dunkerque fin septembre.

Salut Space Alligators, bienvenue chez ILLICO ! Alors, qui êtes-vous les gars ?
Martin : On est quatre copains qui se sont rencontrés dans un avion pour la Californie, et depuis on ne se quitte plus !

C’est vrai ?
Martin : c’est pas vrai.

Alors vous êtes qui ?
Simon : en fait on s’est rencontré à l’ANPE, Martin n’avait plus de travail…
Nathan : on a décidé de liguer nos forces. Moi je suis cuisinier, Simon est danseur professionnel, Martin travaille dans le bâtiment…

Je vous arrête, on va être amené à en reparler tout à l’heure… Vous avez commencé par des reprises un peu décalées. Vous me racontez le chemin depuis ce moment jusqu’à maintenant ?
Martin : il s’est passé plein de choses, ça fait très longtemps. Ça fait plusieurs années qu’on tourne ensemble, qu’on a les mêmes influences, mes mêmes goûts musicaux. Depuis les premières compos qui sont arrivées il y a une dizaine d’années on a beaucoup évolué, le style a peu changé, et on a commencé à trouver notre style il y a cinq ans, quand c’est vraiment devenu le SPACE ALLIGATORS qu’on connait aujourd’hui.

Et c’est quoi le SPACE ALLIGATORS d’aujourd’hui ?
Martin : c’est un rock très feel good, dans lequel on veut véhiculer plein de sourires
Nathan : c’est vraiment de la pop, des mélodies assez entêtantes, on a nappé tout ça de petits riffs de guitare pour avoir un truc assez accrocheur qui nous intéressait beaucoup, puis avec l’arrivée de Simon et ses vibes, y a eu des rajouts d’esthétique électronique, des nappes
Simon : j’ai amené un peu de pop dans leur rock…
Nathan : on s’est mis tous à chanter aussi, parce que pendant un temps c’était beaucoup Martin qui était leader-chanteur, et maintenant on est tous leaders-choristes (rires), et tout ça participe à notre identité.
Simon : on a dit de nous qu’on était les Beach Boys du Nord.

Vous vous êtes formés sur des reprises, c’est un passage obligé ?
Martin : tout musicien qui commence mixe les artistes qui l’inspirent. Aujourd’hui encore on continue de faire des reprises à notre sauce parce que ça nous fait délirer.

C’est quoi le déclic qui fait passer de la reprise à la compo ?
Martin : Y a une grosse partie de narcissisme dans l’histoire, on veut que les gens apprécient ce que nous créons, nous.

C’est venu d’une frustration ?
Martin : ça venait surtout de l’envie de partager ce qu’on avait au fond de nous. On avait des mélodies, on avait des textes, il fallait qu’on mette ça bien en forme pour le partager, et aussi se dire que nous aussi on savait le faire, qu’on pouvait nous aussi écrire notre page…
Nathan : on avait ce plaisir de faire des reprises, mais au bout d’un moment on s’est un peu écouté. Se retrouver pas mal en studio, jammer, répéter des petits trucs, nous a fait nous dire qu’on pouvait se laisser tenter par le truc, et ça l’a fait, on a trouvé du plaisir à le faire. Et en proposant au public, il y a eu un plaisir mutuel. À coups de tremplin et autres, on est monté, niveau scène, des trucs de plus en plus gros, c’était des nouveaux challenges, des conditions qu’on ne connaissait pas.

Qu’est-ce que vous avez à dire et à proposer dans vos textes ?
Martin : le maitre-mot est de véhiculer de la bonne humeur et que les gens repartent avec le smile et des mélodies qui restent en tête. C’est pour ça qu’on est vachement axé sur le live, on est beaucoup dans le partage, on veut transmettre des émotions très très positives et essayer de faire un peu oublier le quotidien. Pas mal de textes parlent de ce qui peut nous arriver dans la vie, la maladie, se faire larguer, perdre son boulot…mais on raconte tout ça avec des mélodies très positives et on essaye de trouver du bon dans tout ce qui nous arrive. Il se passe plein de choses dans la vie, et on essaye de se relever à chaque fois.
Rémy (à Simon) : c’était beau…

Il y a un « cadre » SAPCE ALLIGATORS, des limites, ou des frontières que vous ne franchirez pas artistiquement ?
Simon : je pense pas. On fait ça avec le cœur, on se casse pas la tête à se censurer d’une manière ou d’une autre
Remy : on ne se met pas de cadre, on teste les choses, et si on va trop loin et que ça ne nous plait pas, alors on revient en arrière, on ose le faire.
Simon : y a un cadre naturel des choses, qui dépend de ce qui nous plait, si demain on veut se mettre à la Dub Step on le fera.

Faire de la pop ne vous interdit pas de faire du punk ?
Martin : Non !
Simon : on n’est pas trop du genre à se mettre dans des cases, et on n’a pas trop de limites en soi.
Nathan : c’est très collégial. Va y avoir une idée, on va la proposer, on va essayer de la défendre au max, et il faut que ça fasse l’unanimité pour qu’on y aille, quelle que soit la proposition, y compris farfelue.

En parlant de farfelu, pourquoi « Space Alligators » ?
Simon : C’est Martin, qui à l’époque avait un clavier d’ordinateur sans la touche « espace », du coup ce qu’il écrivait n’avait aucun sens, et Nathan avait un pull vert qui faisait fuir une fan, jusqu’à ce qu’il l’accoste.

Ok j’aurais pas ma réponse (rires), mais est-ce que du coup votre nom n’est pas lui-même une limite ? Est-ce que vous pouvez entrer complètement dans le sérieux avec un nom comme celui-là ?
Martin : la seule limite qu’on se donne est d’éviter de donner des leçons, et aussi de ne pas s’engager. On reste dans la légèreté, et on garde une certaine distance avec l’engagement, même si on est certainement engagé à titre personnel, mais on ne veut rien imposer, on a envie que les gens puissent facilement s’identifier à ce que nous proposons. On n’a pas envie de donner des leçons, dire aux gens ce qu’ils ont à faire
Simon : on est feel good, c’est pas demain qu’on va politiser le projet.

On parlait de frontières artistiques. Pour rester sur ce mot, est-ce qu’avec Space Alligators les Hauts-de-France se situent entre l’Angleterre et la Californie ?
Nathan : ouais carrément, et encore, il se passe des nouvelles choses, parce que là on prépare notre premier album, dans lequel il y aura peut-être trois, quatre titres en français, c’est un peu nouveau pour nous, et ce qui va un peu habiller cet EP sera une touch un peu disco, à la Cerrone, des trucs un peu plus électroniques et dansants, des claviers un peu kitch, et ça va nous ramener ailleurs.
Simon : en France quoi ! La French Touch en gros, on va rester dans notre esthétique mais en étant un peu plus disco, et pouvoir ambiancer
Nathan : disco-funky, années 70-80 !

«  On est un groupe qui prend son temps, pour l’album on veut garder douze, quatorze titres vraiment phares, et ça représente le double ou le triple en terme de maquette. »

Est-ce que chaque composition démarre avec l’ambition de marquer les gens, ou de rester en tête, ou on se fait juste plaisir et advienne que pourra ?
Martin : on a vraiment envie que ça reste en tête. Donc on se casse un peu le cul, ouais. Quand on a une proposition qui ne nous paraît pas à la hauteur, et qu’on se dit qu’elle passera inaperçue, on ne creuse pas plus. Par contre des fois ça part de pas grand-chose, quatre, cinq notes et on se dit « ah ouais putain ce truc là va être cool », et c’est ce qui nous intéresse.

Et vous ne vous accrochez pas à la fausse bonne idée de départ ?
Nathan : Nan, il faut vraiment le truc accrocheur !

Comment vous tranchez ? C’est démocratique ?
Martin : Ouais !
Remy : ouais, on peut le sentir, on fait des petits arrangements, des petites mises en place, puis on se regarde, et on se dit que non.
Martin : mais en général on sent quand un morceau va vraiment sortir du lot.
Nathan : et passer le step du dessus.

Y a pas de vexation possible, pour l’un des membres du groupe ?
Tous : si si !
Nathan : c’est arrivé à plusieurs reprises qu’on propose des trucs… y a ce côté frustration, mais finalement y a le côté aventure collective qui fait qu’on passe au-dessus, que si c’était peut-être pas le bon moment on le travaillera chacun de manière individuelle pour le reproposer six mois plus tard, et ça passera peut-être cette fois là. On est un groupe qui prend son temps, pour l’album on veut garder douze, quatorze titres vraiment phares, et ça représente le double ou le triple en terme de maquette. On est assez rigoureux.
Martin : on se donne pas le droit à l’erreur, on ne veut vraiment pas qu’un morceau fasse tâche dans le lot. On a besoin d’être convaincu nous-mêmes.

Être programmés au Main Square, ça représente quoi pour vous ?
Martin : c’est une reconnaissance, parce que ça veut dire qu’on a notre place sur l’affiche. Et en plus, ça reste dans notre région, et c’est super cool de pouvoir jouer sur une grosse scène comme celle-la, avec des artistes internationaux qu’on écoute depuis qu’on est gamin.
Nathan : et en même temps c’est devant les copains et la famille, et du coup c’est ambivalent dans l’émotion, y a l’adrénaline de l’événement, et en même temps c’est presque un pied dans la maison. Mais un plaisir inouï, oui.

Qu’est-ce que vous pouvez attendre et espérer d’un tel événement ?
Remy : déjà, prendre du plaisir !
Nathan : ouais, c’est avant tout ça. Professionnellement, j’ai pas l’impression qu’on ait spécialement d’attentes.
Martin : ça va marquer une légitimité dans le projet, c’est une belle ligne sur le C.V., et ça nous conforte aussi concernant nos ambitions. On est en train de bosser sur un album, on a signé avec un éditeur l’an dernier, WTPL, et donc ça tombe bien, dans le processus. Ça va annoncer une belle année 2023 je pense !

Vous avez tourné un clip dans une église. Quelle était la démarche ?
Simon : l’acoustique, et la beauté du lieu. Rien de spirituel. L’église était désacralisée. On a aucun engagement religieux. On voulait juste une bonne acoustique, le morceau parle d’avion, et on pouvait pas jouer dans un avion.

À l’heure où tout et n’importe quoi peut être perçu par tout le monde et n’importe qui comme de la provocation, où se situe la vraie provocation selon vous ?
Remy : là en l’occurrence, ni les paroles, ni dans les images, il n’y a quelque chose de provocant. Y ajuste de belles images.

Ma question est plus large que le clip en lui-même.
Simon : ça n’existe plus la provocation, faut arrêter de se prendre la tête et prendre le truc sincèrement, à partir de là on n’a rien à se reprocher. De toute façon il y aura toujours quelqu’un pour se prendre la tête.
Martin : pour moi, on peut provoquer de plein de façon, et il faut garder de la provoc’.

La provoc’ peut faire partie de votre champ d’intentions ? Est-ce qu’une part de la mission de la musique n’est pas de bousculer ?
Martin : on essaye parfois de provoquer, notamment dans notre jeu de scène, on tente des choses, mais on est dans une provoc’ positive, on ne cherche pas la réaction négative. On n’ira jamais dans le biais de provoquer pour faire un bad buzz, ou juste faire réagir pour faire parler de nous, clairement. On ne veut pas bousculer. On n’a pas cette envie là de faire bouger les choses.
Simon : on veut faire bouger les gens.
Remy : bousculer gentiment.
Martin : je me sens absolument pas légitime de faire passer des messages.
Simon : de dire aux gens ce qu’ils doivent faire de leur vie, on leur dit juste ce qu’ils doivent faire au concert !
Martin : d’autres le font beaucoup mieux que nous pour ce qui est des messages, on préfère leur laisser ce créneau là.

« si on sort un album qui nous plait à fond, et dans lequel on mettra plein de choses qui auront besoin d’être défendues sur scène, notre envie première sera d’aller le jouer au maximum… »

À côté de ça, vous avez un job ?
Martin : je travaille dans le bâtiment.
Nathan : je suis dans l’édition musicale, au service d’autres artistes.
Remy : je suis graphiste.
Simon : et moi je suis dans le son, dans la technique.

Comment on concilie l’envie de vivre de sa musique, et les obligations qu’on a de payer ses factures avant d’y parvenir ? Quel est le degré de frustration ?
Martin : pour moi, c’est au niveau du planning. Faut déjà trouver un patron qui accepte qu’on prenne des journées en semaine pour aller faire un concert à droite à gauche, faut se garder du temps parce qu’en plus du boulot y a du perso aussi, la famille, faut jongler avec tout ça.
Nathan : ouais, ça se situe au niveau de la gestion du temps.

Vous seriez plus créatifs encore, sans cette frustration, ou c’est elle qui vous permet justement de l’être ?
Martin : on ne sait pas en fait (rires), on a toujours eu ce rythme là.
Simon : je crois aussi que ça nous plait de garder un pied à terre à côté de la musique, de couper un peu, même si pour Nathan c’est dans l’édition musicale et pour moi dans la technique du son. Ça nous fait du bien aussi d’avoir à côté un truc qui n’a rien à voir avec la musique. Je sais pas comment je le vivrais si j’étais musicien à plein temps. Là, ça permet de garder les pieds sur terre d’une certaine manière, même si c’est pas trop mon cas, (à ses potes) mais en tout cas pour vous c’est bien ! (rires)

Vous me parlez de vos projets, de vos envies ?
Nathan : ça fait deux ans, un peu avant le covid, qu’on a cette envie de partir sur les routes, et là on a signé avec un éditeur, et je pense qu’on aura toujours le souhait, comme on a toujours été un groupe de live, de dépasser un peu les frontières de la région, on est un peu allé à Paris, mais on aimerait aller en Angleterre par exemple, en Allemagne, voire en Pologne, parce que Martin a des pistes là-bas. Voilà, partager plus loin, avec plus de gens, faire un très bon disque.
Remy : c’est toujours ultra satisfaisant de voir les gens bouger sur les riffs, c’est vraiment l’un des trucs primordiaux.
Martin : et dans l’ordre des choses si on sort un album qui nous plait à fond, et dans lequel on mettra plein de choses qui auront besoin d’être défendues sur scène, notre envie première sera d’aller le jouer au maximum, de le diffuser le plus possible, que tout le monde puisse l’entendre.
Simon : et même humainement, ça doit être une super expérience, partir à quatre copains, être dans un van, et jouer pendant une semaine, être ensemble.

Merci beaucoup SPACE ALLIGATORS !